"Les Exercices" de La Fontaine & Cie : des épisodes dont vous êtes le héros !
Pendant une heure, nous entrons ensemble dans le texte pour en construire votre interprétation personnelle.
De longs temps de silence pour vous permettre, stylo en main, de composer votre lecture business, mais surtout personnelle, du texte à l'étude.
Ici, un extrait de Dom Juan, de Molière.
Pour la première fois, nous abordons le registre du théâtre sur La Fontaine & Cie, et un "fragment du discours amoureux" de surcroît !
Très étonnamment, les enseignements pour nos quotidiens en entreprise sont légions !
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Chaque semaine, un texte classique, des conseils pro et une citation à caser en réunion, sans parler des bonus exclusifs !
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Dom Juan, de Molière
Acte I, scène 2.
DOM JUAN.- Quoi qu’il en soit, je ne puis refuser mon cœur à tout ce que je vois d’aimable, et dès qu’un beau visage me le demande, si j’en avais dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations naissantes après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l’amour est dans le changement. On goûte une douceur extrême à réduire par cent hommages le cœur d’une jeune beauté, à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait ; à combattre par des transports, par des larmes, et des soupirs, l’innocente pudeur d’une âme, qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous oppose, à vaincre les scrupules, dont elle se fait un honneur, et la mener doucement, où nous avons envie de la faire venir. Mais lorsqu’on en est maître une fois, il n’y a plus rien à dire, ni rien à souhaiter, tout le beau de la passion est fini, et nous nous endormons dans la tranquillité d’un tel amour ; si quelque objet nouveau ne vient réveiller nos désirs, et présenter à notre cœur les charmes attrayants d’une conquête à faire. Enfin, il n’est rien de si doux, que de triompher de la résistance d’une belle personne ; et j’ai sur ce sujet l’ambition des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en victoire, et ne peuvent se résoudre à borner leurs souhaits. Il n’est rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs, je me sens un cœur à aimer toute la terre ; et comme Alexandre, je souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes, pour y pouvoir étendre mes conquêtes amoureuses.
SGANARELLE.- Vertu de ma vie, comme vous débitez ; il semble que vous ayez appris cela par cœur, et vous parlez tout comme un livre.
DOM JUAN.- Qu’as-tu à dire là-dessus ?
SGANARELLE.- Ma foi, j’ai à dire, je ne sais que dire ; car vous tournez les choses d’une manière, qu’il semble que vous avez raison, et cependant il est vrai que vous ne l’avez pas. J’avais les plus belles pensées du monde, et vos discours m’ont brouillé tout cela ; laissez faire, une autre fois je mettrai mes raisonnements par écrit, pour disputer avec vous.
Source : toutmoliere.net