🎬 Fiche technique
Mini-série, comédie familiale, en 6×52 min disponible en intégralité sur france.tv depuis le 28 août 2025, et en prime-time sur France 2 à partir du 10 septembre 2025.
* Création originale de Sarah Tissandier, co-écrite avec Fabrice de Costil.
* Production : La série est produite par Redstone (Valérie Tubiana), en coproduction avec France Télévisions.
* Scénario : Sarah Tissandier (The Collection, La Petite Histoire de France, Scènes de Ménages) et Fabrice de Costil (Meurtres à Tahiti, Camping Paradis).
* Réalisation : Stéphanie Pillonca (Disparition Inquiétante, Enquête Parallèle).
🎠Avec : Éléonore Bernheim dans le rôle de Justine Blanchet. Gil Alma dans le rôle de Rémi Blanchet. Charlie Bruneau dans le rôle de Kathy Malinsky. Arié Elmaleh dans le rôle de Jérôme Malinsky. Amaury de Crayencour dans le rôle de Gauthier Gouget. Avec également Marie-Christine Adam, Bernadette Le Saché, Carima Amarouche, Camille Genau, Axel Auriant…
📍 Tournage : automne 2024 – hiver 2025 dans la région Hauts-de-France, principalement autour de Lille et Marcq-en-Barœul.🎶 Musique originale : Maxime Desprez & Michaël Tordjman.🏆 Sélection : présentée en avant-première au Festival de la Fiction de La Rochelle 2025.
Synopsis: Les Blanchet sont sur le point d’accéder au saint des saints de la haute bourgeoisie quand ils se retrouvent ruinés et privés de ressources. Incapables d’assumer ce déclassement, ils vont peu à peu passer du côté obscur de la force pour sauver les apparences... trouvant dans leur double vie rocambolesque et dangereuse un retour de flamme inattendu.
Anecdote: La créatrice Sarah Tissandier s’est inspirée de sa propre expérience : après un licenciement, elle a caché la vérité à sa famille, vivant plusieurs mois dans le mensonge par peur du déclassement. Une situation à la fois pesante et comique, qui lui a donné l’idée d’imaginer un couple entraîné malgré lui dans des combines de plus en plus folles.
🔎 Analyse
Thématique
Jusqu’où peut-on aller pour sauver son confort ou son image ? Dans Dans de beaux draps, cette ligne rouge prend la forme du déclassement social et de la peur de perdre son statut. La série illustre comment l’apparence devient une stratégie de survie, quitte à plonger ses protagonistes dans une spirale de mensonges et de combines. Entre satire sociale, vaudeville et thriller domestique, elle met en lumière les contradictions d’une époque où sauver les apparences compte parfois plus que la vérité.
Moteur sériel
Le récit repose sur une spirale de mensonges. À chaque épisode, Justine et Rémi imaginent une nouvelle combine pour protéger leur image : faux cambriolage, arnaque, vengeance, kidnapping… Mais chaque tentative entraîne une conséquence imprévue qui les enfonce davantage.
Type de conflit
Dans de beaux draps est une série avant tout:
* Character driven : L’histoire naît du couple Justine et Rémi, leur peur du déclassement, leur besoin de sauver les apparences, leurs choix douteux mais drôles. Le moteur principal, ce sont leurs émotions (honte, peur, fierté, amour familial), leur dynamique de duo, leur double identité.
* Elle comporte aussi une forte composante arena driven, car l’arène sociale (la bourgeoisie provinciale, la pression du regard des autres, le voisinage, les réseaux d’influence) nourrit énormément le conflit. C’est bien parce qu’ils veulent rester dans ce monde-là , qu’ils basculent dans la double vie.
Crescendo dramatique en trois temps
⚠️ SPOILER
* Episodes 1 et 2: Le couple découvre la ruine et organise un faux cambriolage, avant d’être trahi par leur assureur.
* Episodes 3 et 4: développent la pression sociale, les faux objets de luxe, la jalousie et les crises conjugales.
* Episodes 5 et 6 : franchissent une nouvelle étape avec l’enlèvement de la mère de Rémi, des manipulations politiques et une confrontation finale avec la corruption.
FIN DU SPOILER ⚠️.
Arches narratives
* Une arche familiale, qui révèle l’hypocrisie des parents.
* Une arche sociale, qui dénonce la bourgeoisie corrompue et l’illusion du “club” mondain, face à la Cité qui peine à survivre et dont les habitants subissent les conséquences du système.
* Une arche policière, où l’enquêtrice se retrouve confrontée à la difficulté d’investiguer sur ses propres connaissances.
Humour
Repose sur plusieurs registres :
* Le comique de situation, quand un couple “normal” s’improvise cambrioleur, le contraste entre leur image bourgeoise et leurs actes illégaux crée l’effet comique.
* L’humour de quiproquo et de vaudeville, avec mensonges en cascade, doubles vies, malentendus avec la police, situations domestiques qui dégénèrent.
* La satire sociale, on rit de l’obsession des apparences, du désir de reconnaissance, de la peur du déclassement.
Ce qui fonctionne
* Un ton efficace, mêlant humour, émotion, satire sociale et suspense.
* La complicité d’Éléonore Bernheim et Gil Alma, à la fois touchants et drôles, donne un vrai relief au couple central. Leur dynamique rend le duo attachant et crédible, et leurs scènes de mensonge conjugal ou de combine improvisée sont parmi les plus réussies de la série.
* Les personnages secondaires, notamment les enfants, enrichissent l’arène familiale et permettent à la série d’explorer différentes facettes du déclassement et de l’obsession des apparences.
* La réalisation de Stéphanie Pillonca, élégante et rythmée, apporte une vraie fluidité et soutient le mélange des tons. On sent une mise en scène précise mais jamais pesante, qui valorise les moments comiques.
* Proposer une comédie familiale et populaire accessible tout en assumant un regard satirique sur la bourgeoisie et le déclassement, un registre encore peu exploré dans la fiction française de prime time.
Ce qui fonctionne moins
* Un manque de nuance: tous les riches sont représentés comme corrompus ou pervers, tandis que les autres sont dépeints comme honnêtes (ou malhonnêtes pour la bonne cause) et victimes d’un système qui les écrase. Ce manichéisme s’explique par le registre de la comédie, qui repose volontiers sur la caricature et l’exagération. Mais cette simplification appauvrit le propos. L’absence de nuance rend les situations lisibles et drôles, comme dans le vaudeville où chaque rôle est archétypal. Cependant, la nuance aurait pu enrichir le récit en ajoutant de la profondeur émotionnelle ou des renversements inattendus, à l’image de séries où les “méchants” se révèlent aussi pathétiques, touchants ou vulnérables. Ici, l’absence de demi-teintes produit un humour frontal et efficace, mais prive la série d’une subtilité qui aurait pu prolonger son impact.
* Un manque de réalisme. De nombreux détails paraissent difficilement crédibles (Justine qui squatte chez la secrétaire, Rémi qui se met en danger et vole un appareil de cuisine à 90 euros comme s’il en valait 500€, les policiers qui identifient directement son véhicule volé…). Ces invraisemblances ne gênent pas la logique comique car la série assume un ton d’humour pur, mais elles affaiblissent l’immersion.
* Une mécanique qui peut sembler répétitive. La série est riche en conflits, mais au bout du troisième cambriolage, on commence à anticiper la formule et à se lasser, ce qui amoindrit la tension dramatique. On aurait aimé davantage de surprises ou de retournements inattendus. De plus, l’absence d’ancrage territorial clair nuit à la cohérence : on a parfois l’impression que tout le monde se connaît dans la ville, ce qui réduit l’ampleur de l’arène sociale.
* ⚠️ SPOILER - Certaines intrigues paraissent trop prévisibles. L’histoire d’amour entre Capucine et le jeune infirmier de la Cité prend des allures de coup de foudre un peu trop rapide : ils se rencontrent, s’embrassent presque immédiatement, puis se marient sans que l’on perçoive vraiment l’évolution de leur relation. On aurait gagné en intensité dramatique si ce lien s’était construit progressivement, en mettant davantage en avant le dilemme de Capucine : se marier pour le statut sous l’influence de ses parents, ou suivre son cœur au risque de les décevoir. Là encore, le mariage final paraît précipité et pas forcément nécessaire. Même constat pour d’autres péripéties : les Blanchet qui décident de cambrioler leur assureur, et qui tombent “par hasard” au moment où le couple part en week-end.
* Ce déficit de profondeur touche aussi les arcs de personnages. Rémi, présenté comme un père “droit” (d’ailleurs ce n’est pas montré mais dit, cela aurait été plus impactant de le voir), qui se révèle menteur depuis toujours dès le second épisode, ce qui entre en contradiction avec sa droiture. On aurait gagné à faire porter le rôle de la droiture à Justine, qui aurait alors basculé progressivement dans le goût du cambriolage. Cela aurait rendu son évolution plus claire et plus intéressante. Capucine, bien incarnée, reflète la prison dorée d’un mariage de convenance, mais son dilemme aurait pu être renforcé en montrant plus explicitement la pression parentale et sa peur de décevoir. Lucas, de son côté, incarne bien le parallèle ironique entre l’hypocrisie des parents et ses propres vols de copies, mais sa relation avec la fille de flic aurait gagné à devenir un vrai conflit de loyauté : il aurait pu être pris entre l’amour et la famille, sa copine contrainte de l’espionner pour sa mère, lui obligé de lui mentir pour protéger ses parents. Cela aurait ajouté une tension dramatique bienvenue.Du côté des Malinsky, avec la femme flic, la dynamique reste trop sage. Le père, ancien ami d’université de Rémi, aurait pu entrer dans une vraie confrontation : trahi, en colère, partagé entre amitié et désillusion. Le potentiel dramatique n’est pas entièrement exploité. Quant à la famille de Rachida, elle fonctionne comme un contrepoint humoristique intéressant, mais son rôle reste anecdotique : on aurait aimé qu’elle soit plus active dans le récit - FIN DU SPOILER ⚠️.
Conclusion
Dans de beaux draps est une comédie légère et rafraîchissante qui amuse par ses quiproquos et ses exagérations, mais dont les conflits manquent de consistance. Les dilemmes esquissés auraient pu être poussés plus loin sans nuire à l’humour, et les personnages auraient gagné à évoluer dans des nuances plus complexes. Le résultat reste plaisant, mais donne parfois le sentiment d’une comédie qui, en refusant d’approfondir ses enjeux, s’interdit une portée plus durable.
Si vous attendez une satire très nuancée, où même les “méchants” révèlent une part d’ambiguïté ou si vous privilégiez la vraisemblance et la subtilité dramatique, vous risquez d’être un peu déçu.
Par contre, regardez Dans de beaux draps si…
* Vous aimez les comédies françaises légères, qui mélangent quiproquos, humour de situation et satire sociale.
* Vous appréciez les séries familiales où chaque personnage,parents comme enfants, a sa part de contradictions.