Synopsis
đŹ Fiche technique
Los años nuevos, une série drame-romance espagnole de 10x45 minutes.
Diffusion : disponible en intégralité sur arte.tv à partir du 7 novembre 2025 et diffusée à la télévision à partir du jeudi 20 novembre à 20h55 sur Arte.
* Production : Caballo Films (Espagne), Movistar Plus+.
* Producteurs : Rodrigo Sorogoyen, Sandra Hermida Muñiz, Eduardo Villanueva, François Sauvagnargues.
* Création : Rodrigo Sorogoyen (Madre, As Bestas), Sara Cano et Paula Fabra.
* ScĂ©nario : Rodrigo Sorogoyen, Sara Cano, Paula Fabra, Antonio Rojano et Marina RodrĂguez ColĂĄs.
* RĂ©alisation : Rodrigo Sorogoyen, Sandra Romero et David MartĂn de los Santos.
đ Avec : Iria del RĂo (Ana), Francesco Carril (Ăscar), Pablo GĂłmez-Pando (Guille), Ana Telenti (Palo), Vladimir Perrin (Manu), LucĂa Martin Abello (Vero).
đ Tournage : principalement Ă Madrid (Espagne), mais aussi Ă Lyon (France) et Ă Berlin (Allemagne).
đŹ Style & ton : Une mise en scĂšne naturaliste et intimiste, marquĂ©e par des plans-sĂ©quences et un regard lucide sur le couple contemporain.
đ Accueil critique : La sĂ©rie a Ă©tĂ© saluĂ©e lors de sa prĂ©sentation Ă la Mostra de Venise 2024 (Hors compĂ©tition) pour sa justesse Ă©motionnelle et son dispositif narratif original. En France, TĂ©lĂ©rama parle dâ« une sĂ©rie dĂ©chirante de simplicitĂ© et de justesse ».
đ Analyse
RĂ©sumĂ© dâĂ©pisodes
Dix Nouvel An pour raconter dix ans de relation entre Ana et Ăscar. Un dĂ©but trĂšs lent (leur rencontre en 2015), puis des retrouvailles alors quâils sont chacun en couple avec quelquâun dâautre, quâils finissent par quitter pour se mettre ensemble (2016). Viennent la vie commune et ses dĂ©boires (2017), un dĂźner familial et les premiers sacrifices (2018), le dĂ©senchantement Ă Berlin et la rupture (2019), le Covid vĂ©cus sĂ©parĂ©ment (2020), Lyon et la grossesse dâAna (2021), des retrouvailles maladroites (2022), une visite Ă un ami en centre de dĂ©sintox (2023), lâadultĂšre (2024), et enfin une fin âheureuseâ (?!).
Dispositif
Un Ă©pisode = une annĂ©e. Aucun repĂšre explicite Ă lâĂ©cran : difficile pour un spectateur qui ne sait pas ce quâil vient voir, et parfois dĂ©routant mĂȘme quand on suit la sĂ©rie assidĂ»ment. Câest au spectateur de reconstruire les ellipses, mais cette dĂ©sorientation fait partie du projet et on finit par sây habituer.
Le cadre
Madrid, Valence, Berlin, Lyon⊠Lâamour se dĂ©place avec eux. Ce mouvement constant ajoute une touche de rĂ©alisme dans une Europe vivante.
Moteur sériel
Pas dâintrigue traditionnelle : câest le passage du temps qui fait avancer lâhistoire Ă travers un dispositif chronologique.
Objectif(s)
Objectif initial : ĂȘtre ensemble (atteint dĂšs lâĂ©pisode 3). Ensuite : survivre Ă la routine mais ce nâest pas un objectif tangible. Puis, aprĂšs la sĂ©paration (Ă©pisode 5), il reste : se reconstruire, se retrouver, peut-ĂȘtre se remettre ensemble⊠mais sans rĂ©el enjeu clair.
Conflits
Conflits essentiellement internes : Oscar reste prisonnier du passĂ©, Ana avance mais doute. On peut mĂȘme se demander si Ana est rĂ©ellement protagoniste ou juste miroir dâOscar : le point de vue repose souvent sur ses problĂ©matiques et ses dĂ©sirs, et un Ă©pisode entier se dĂ©roule sans elle.
Arches
Certaines arches secondaires (comme lâĂ©pisode en centre de dĂ©sintox) paraissent accessoires, sauf Ă les lire comme un parallĂšle mĂ©taphorique Ă la dĂ©pendance amoureuse, ce qui nâapparaĂźt pas clairement Ă lâĂ©cran (contrairement Ă tout le reste).
Dynamique
Ils sont Ă la fois partenaires et antagonistes. Ils sâaiment, se sabotent, hĂ©sitent, se ratent. TrĂšs peu de sous-texte : tout est dit, expliquĂ©, montrĂ© (sauf dans quelques regards et silences) laissant souvent le spectateur extĂ©rieur.
Rythme
Globalement lent, surtout au dĂ©but, avec un vrai manque de conflits. La sĂ©rie se regarde plus comme une chronique Ă©motionnelle quâun rĂ©cit dramatique.
LâĂ©volution dâun couple
On observe la banalitĂ©, la beautĂ© et lâĂ©rosion dâun couple : espoirs, renoncements, tentatives de recommencer, cycles passion/ennui.
La thématique
Confiance, dĂ©pendance affective, carriĂšre des femmes, dĂ©sir (ou non) dâenfant, mĂ©nopause, lassitude.Elle renonce, doute, avance ; lui hĂ©site, jalouse, stagne. Dans un couple, chacun renonce Ă quelque chose. La sĂ©rie montre comment la peur dâaimer, ou plutĂŽt la peur dâĂ©chouer, finit par parasiter le lien.Le thĂšme semble alors ĂȘtre : comment donner sa chance Ă une histoire quand on anticipe dĂ©jĂ quâelle finira mal ?
Amour vs. Passion
Ils se dĂ©sirent quand ils se perdent et se lassent quand ils se retrouvent. On retrouve ce schĂ©ma familier oĂč lâon veut lâautre tant quâil nâest pas lĂ (cf: mon article sur French Lover). Quitte Ă avoir un manque de conflits, on aurait aimĂ© que la sĂ©rie ose rendre le quotidien dĂ©sirable, romancer la stabilitĂ© plutĂŽt que le manque.Le final reste typiquement passionnel : elle quitte probablement son mari parfait, bouleverse la vie de son enfant, pour rejouer une histoire que le temps a brisĂ©. Un happy ending discutable, et qui nâaurait sans doute pas mieux fonctionnĂ© si elle avait eu un enfant avec ĂscarâŠ
Reflet dâune gĂ©nĂ©ration
La sĂ©rie capte la fatigue sentimentale contemporaine, lâincapacitĂ© Ă choisir, Ă durer.
DÚs les premiers épisodes, une question se pose : Los años nuevos est-elle une fiction ou un documentaire sur le couple ?
Scénario
Tout paraĂźt vrai : Ă©motions, maladresses, silences, et pourtant tout est Ă©crit. Les comĂ©diens lâont dit : les dialogues Ă©taient dĂ©jĂ trĂšs prĂ©cis, pensĂ©s pour sonner spontanĂ©s. Le vrai travail sâest jouĂ© dans les regards, les rĂ©actions et les non-dits.
Jeu dâacteur
Justesse remarquable : on croit assister Ă des moments saisis sur le vif.
Plans
Plans-séquences immersifs, durée réelle des actions, silences assumés, ajoutant à cette sensation de voyeurisme.
ScĂšnes
Moments troublants (hallucination Ă Berlin lors de la discussion avec le mec du vestiaire/miroir au fond du cadre, projection dâOscar Ă Lyon comme projection ou fantĂŽme du passĂ©) qui jouent avec la frontiĂšre rĂ©alitĂ© / fiction.
Fiction vs. documentaire
Ce travail sur le vrai sâinscrit dans un mouvement plus large oĂč les frontiĂšres entre fiction et documentaire se brouillent. Des Vivants (cf: mon article sur Des Vivants) laisse le rĂ©el sâemparer de la fiction en rejouant des faits historiques. Ceux qui rougissent sâappuie sur lâimprovisation et des acteurs qui jouent leur propre rĂŽle.Dans Los años nuevos : tout est Ă©crit, mais le jeu et la mise en scĂšne recherchent une illusion de spontanĂ©itĂ© totale.
Sexe
Les scĂšnes sont rĂ©alistes, pas provocatrices, mais trĂšs nombreuses, parfois trop longues (prĂšs de 7 minutes dans lâĂ©pisode 1), avec un effet de voyeurisme, dâautant quâaucun coordinateur dâintimitĂ© nâest crĂ©ditĂ©. Ătait-ce nĂ©cessaire ?
Alcool, clopes et drogues
Le mĂȘme rĂ©alisme sâapplique Ă lâalcool, aux cigarettes et aux drogues, omniprĂ©sents. Ces gestes deviennent des refuges ou des dĂ©pendances. Mais Ă force de tout montrer, jusquâĂ Ă©voquer de nouvelles drogues presque âcoolâ, la sĂ©rie flirte parfois avec une forme dâincitation.
* Le passage du temps rendu tangible : on les voit changer physiquement.
* Les portraits face camĂ©ra de diffĂ©rents couples quâils dĂ©crivent : parfois inspirĂ©s de leur vĂ©cu, parfois totalement projetĂ©s.
* On y apprend aussi quelques traditions espagnoles, comme celle des douze raisins au Nouvel An.
Conclusion
Los años nuevos est une chronique sincĂšre, parfois trop vraie, dâun amour qui se dĂ©fait et se rejoue. Une sĂ©rie qui demande de la patience dans ses premiers Ă©pisodes, mais qui touche par sa justesse et par la maniĂšre dont elle fait exister le passage du temps.