🎬 Fiche technique
Série américaine et britannique en 10 épisodes de 37 à 58 minutes, Too Much est disponible sur Netflix depuis le 10 juillet 2025.
Produite par Good Thing Going(la société de Lena Dunham) en collaboration avec Working Title Television (Tales of the City, Hanna) et Netflix Studios, la série marque le retour de Lena Dunham à la télévision depuis Girls.
* Création, production exécutive & direction artistique : Lena Dunham (Girls)
* Scénario : Lena Dunham & Luis Felber (son mari)
* Réalisation : Lena Dunham et réalisateurs invités
🎭 Avec : Megan Stalter (Cora Bora), Will Sharpe (The White Lotus S2), Emily Ratajkowski, Jessica Alba, Rita Ora, Andrew Scott, Michael Zegen, Kit Harington, Adèle Exarchopoulos, et Lena Dunham dans un rôle secondaire
📍 Tournage : Royaume-Uni et États-Unis🎯 Genre : comédie romantique dramatique, autofiction
Inspirée de la relation réelle entre Lena Dunham et son mari Luis Felber, la série suit Jessica, une Américaine qui s’installe à Londres après une rupture, et qui navigue entre rencontres, blessures intimes et recherche d’un nouvel équilibre affectif.
Côté réception, la série a suscité des réactions contrastées : elle n’a pas intégré le Top 10 streaming Netflix US lors de sa première semaine, mais a enregistré un indice de demande 22,3× supérieur à la moyenne selon Parrot Analytics, rivalisant avec Hacks ou The White Lotus.
🔎 Analyse
La nouvelle série de Lena Dunham, "Too Much", porte bien son titre : tout y est excessif. Une héroïne égocentrique et instable, des personnages secondaires surchargés de problématiques, une histoire d'amour toxique qui se veut romantique, et un rythme languissant, ponctué de scènes inutilement longues. Pourtant, la série ambitionne de dresser le portrait d'une génération en perte de repères, tiraillée entre quête d'authenticité et besoin d’adaptation sociale.
Ni vraiment comédie, ni vraiment romantique, encore moins feel good…
Too Much est présentée par Netflix comme une comédie romantique. Mais dès les premiers épisodes, le ton s’avère bien plus sombre qu’annoncé. L’idée d’une romcom modernisée, avec plus de réalisme et de complexité émotionnelle, pourrait être séduisante. Sauf qu’ici, le mélange ne prend pas. On attend d’une comédie romantique un minimum de légèreté, un effet feel good, or la série accumule au contraire les éléments dramatiques, voire tragiques, au point qu’il devient difficile de savoir ce que l’on regarde vraiment. Finalement, au lieu d’un équilibre subtil entre comédie et drame, Too Much donne l’impression d’un récit pesant, qui échoue à assumer son identité.
Une héroïne… étouffante
Jessica est un personnage difficile à suivre : constamment triste, en colère ou dans la plainte, elle parle sans arrêt d’elle-même, à ses proches comme à la caméra. Le procédé des vidéos adressées à Wendy, la nouvelle compagne de son ex, illustre cette obsession du "je" qui devient rapidement pesante. On peine à s'attacher à elle, malgré des éclats de vulnérabilité qui surgissent sporadiquement.
Une romance qui manque de crédibilité
Dès le premier épisode, Jessica rencontre Félix, musicien torturé. Leur rapprochement est immédiat et excessif, sans réelle construction émotionnelle. Leur relation, censée porter la série, souffre d'un manque flagrant de chimie à l’écran. Pire : Félix accumule les red flags (infidélité, dépendances, instabilité affective), sans que Jessica ne semble réellement s’en inquiéter. (SPOILER) La série valide implicitement l'idée qu’une relation toxique peut aboutir à un mariage heureux… (FIN DU SPOILER) un message discutable.
Des personnages secondaires… trop nombreux et mal exploités
Entre collègues “woke” (je suis plutôt partisane d’introduire des personnages originaux et modernes en fiction, mais ici on frôle parfois la caricature… Or, au vu de l’image publique de Lena Dunham, qui défend l’inclusion et les figures hors cadre, il est difficile de croire que ce soit intentionnel, ce qui donne plutôt l’impression d’un raté), voisin énamouré sorti de nulle part, patrons dysfonctionnels et famille aux conversations gênantes, la série aligne une galerie de personnages secondaires dont on peine à saisir la fonction. Ni véritable série chorale, ni comédie de bureau, ce flottement narratif finit par alourdir l’ensemble.
Une esthétique travaillée mais vaine
Certains effets visuels stylisés et la bande-son soignée participent à l’ambiance mélancolique et pop. Mais ces artifices peinent à masquer le fond : l'intrigue principale stagne, les dialogues s'étirent, et les scènes sans enjeux se multiplient.
Un propos flou
La série semble vouloir interroger la question suivante : Faut-il rester soi-même à tout prix ou s’adapter au monde qui nous entoure ?
Le problème : la réponse semble être… (SPOILER) s’enfoncer dans une relation toxique alors qu’on ne s’est pas remis de sa rupture précédente, en épousant son nouveau copain après quelques mois de rencontre, en acceptant ses tromperies et ses dérives (mais il lui a dit la vérité donc tout va bien…). (FIN DU SPOILER) Un final qui laisse franchement perplexe.
Un casting prometteur… sous-exploité
Ce qui renforce la frustration face à "Too Much", c’est son casting impressionnant. Michaela Coel dans le rôle de Jessica, Will Sharpe dans celui de Félix, et en guests : Michael Zegen (Zev, l’ex), Emily Ratajkowski (Wendy), Andrew Scott (le réalisateur), Naomi Watts (la femme du boss), Adele Exarchopoulos (Poly), sans oublier Rita Ora en guest improbable. Même Kit Harington fait une apparition dans le rôle du père décédé.
Malheureusement, cette distribution prestigieuse est rarement mise en valeur. Le problème vient-il de l’écriture, de la direction ou du jeu d’acteur lui-même ? Difficile à dire, mais certains choix laissent perplexe. Andrew Scott, pourtant habitué aux personnages ambigus, paraît ici particulièrement gênant. Michael Zegen, quant à lui, peine à rendre son personnage (Zev) crédible ou même intéressant.
Dans cet ensemble, quelques surprises positives : Adèle Exarchopoulos, à l’aise dans une série internationale, avec un anglais fluide et un accent discret ; et Emily Ratajkowski, qui livre une performance étonnamment juste dans un rôle pourtant sous-écrit.
Ce qui mérite néanmoins d’être salué :
* (SPOILER) L’évocation rare des abus dans l’enfance par les femmes (la "nounou pédophile" de Félix) même si le sujet est survolé… (FIN DU SPOILER)
* Une réflexion intéressante sur l’influence des relations passées sur les histoires présentes.
* Quelques dialogues percutants.
* Une bande-son efficace et un casting solide (malgré l'écriture incohérente des personnages).
En résumé :
"Too Much" ressemble à une autofiction générationnelle qui cherche à faire vrai, mais tombe un peu dans la caricature et le cliché. Entre la normalisation des substances, le recyclage des romances toxiques comme idéal amoureux, et une héroïne plus irritante qu’attachante, la série perd son propos sous une couche de prétendue modernité. Reste une série inégale, un peu "trop" sur tous les plans.