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Description

🎬 Fiche technique

Série française en 8×30 min, Young Millionaires est disponible sur Netflix depuis le 13 août 2025.

* Production: La série est produite par Five Dogs, la société d’Igor Gotesman (Family Business, Fiasco).

* Scénario: La série est co-écrite par Carine Prévôt (Family Business S3, Sirènes et co-créatrice de Les Lionnes série Netflix à venir), Mahault Mollaret(Tendre et saignant, Trop d’amour, Les Lionnes), et Olivia Barlier (documentaires Commises d’office, Escort Boys: ce que veulent les femmes, et qui, si mes informations sont correctes, développe notamment une potentielle adaptation française du drama coréen Extraordinary Attorney Woo).

* Réalisation : Igor Gotesman lui-même, Théo Jourdain et Mohamed Chabane (ReuSSS), et Tania Gotesman (Fiasco).

🎭 Avec : Abraham Wapler(incarne David), (Reusss, Salade Grecque, Caro Nostra, Toulouse Lautrec, Jeune et Golri, Fleur Bleue et Star Wars: Andor (S2)), Malou Khebizi(incarne Samia), (révélée grâce au film Diamant brut, rôle pour lequel, elle est nommée pour le César de la meilleure révélation féminine à la cérémonie des César en 2025). Calixte Broisin‑Doutaz, (joue Léo), (Doux Jésus, Neuf Mecs, En Famille et Brocéliande). Sara Gançarski, (incarne Jess), c’est son premier rôle ! Igor Gotesman l’aurait repérée dans un cinéma alors qu’elle était avec ses copines et lui a proposé de passer les essais. Jeanne Boudier, (en Victoire), (De Gaulle Partie 2, Liaison. On a aussi Victor Bonnel(dans le rôle de Paul), (Nudes), Florian Lesieur (Tom)(Furies, Nos vies en l’air), Margot Heckmann(Chloé), (Skam France, Brocéliande) ou encore Idir Azgouli(Samir), (Un prophète, Cimetière Indien, Pax Massilia S2) et Delphine Baril(Un monde merveilleux, ça c’est Paris, Scènes de Ménages…)…

📍Tournage : Marseille et ses environs, août–octobre 2024.🎯Genre : comédie dramatique adolescente.

🎶Bande-son : La série ne se contente pas de sa bande originale composée par Léa Castel et Yoan Chirescu : elle ancre aussi son ambiance dans le rap marseillais, avec notamment des titres de Jul et de SCH, que l’équipe créative écoute beaucoup et qui renforcent encore l’identité locale du récit.

Depuis sa sortie, la série s’est rapidement hissée dans le top 3 mondial Netflix, derrière Wednesday, confirmant le potentiel international des fictions jeunes ancrées localement.

🔎 Analyse

Une idée simple et efficace

Le pitch a tout pour plaire : quatre amis marseillais décrochent un jackpot de 17 millions au loto, mais étant mineurs, ils doivent trouver une personne majeure de confiance pour encaisser le ticket. Entre trahisons, arnaques et coups foireux, leur rêve tourne au cauchemar.Le décor marseillais, la musique, l’énergie des dialogues et un rythme soutenu donnent à la série une vraie identité.

De la série de bande à la série chorale…

Young Millionaires démarre comme une série de bande centrée sur David, moteur d’action et déclencheur des plans.Mais au fil des épisodes, les intrigues se dispersent : chacun a droit à son mini-arc (Jess et la chasteté mais aussi Jess et son père, Samia et ses histoires de cœur (dans tous les sens du terme), Léo entre Samia et Chloé, Victoire et ses mensonges…), au point que l’intrigue principale s’étiole.Finalement on a ni un vrai récit centré, ni un vrai choral équilibré, un entre-deux qui brouille la dynamique.

Des rebondissements à la pelle…

⇒ Attention cette section comporte des SPOILER !

Chaque épisode introduit une ou plusieurs missions : récupérer le ticket, éviter un voyou, relever un gage imposé par un mystérieux “corbeau”…Cette mécanique répétée (mission → échec ou twist → conséquence) maintient un rythme constant, mais dilue l’émotion et les enjeux.

Déjà, on peut se demander pourquoi Victoire, qui ne voulait pas leur donner leurs cartes de crédit, décide soudainement de les leur remettre. On devine qu’elle se sent plus intégrée au groupe, mais c’est seulement suggéré et aurait mérité d’être montré plus clairement.

Et puis, à partir de l’épisode 5, donc juste après le midpoint de la saison, arrive l’intrigue du corbeau et de l’application. On sent que c’est pensé pour éviter un ventre mou, mais ça paraît un peu artificiel. Le principe des gages rappelle d’ailleurs le film Nerve, et confirme que la série vise l’international : presque tous les visuels avec du texte sont en anglais.

Certains retournements paraissent forcés ou peu plausibles : un ticket non payé qui rapporte, un accès à l’argent finalement trop facile, ou des éléments révélés au détour d’une scène, comme par exemple David qui saute dans l’eau alors qu’il ne sait pas nager, paraissent peu crédibles car ils n’ont pas été préparés en amont, alors qu’ils auraient pu bénéficier d’un vrai travail de “set-up / pay-off”, plantés plus tôt dans la série ou au moins dans l’épisode.

Des personnages au potentiel sous-exploité

⇒ Attention cette section comporte des SPOILER !

Dans Young Millionaires, chaque personnage est présenté avec un potentiel certain, mais rarement exploité jusqu’au bout.

* David, le « mec cool », orphelin, enchaîne les idées foireuses avec l’espoir de s’en sortir. Il finit par demander des documents pour connaître l’identité de sa mère, cherchant à combler un vide lié à ses origines. Ses amie.s et le petit chien offert pour sa Bar Mitzva constituent sa seule famille, mais le récit ne le souligne pas clairement. Un discours ou un dilemme fort entre l’argent et ses amie.s aurait pu matérialiser ce thème. Son homosexualité, esquissée dès le premier épisode, n’est jamais approfondie. Quant à son identité juive, évoquée à plusieurs reprises, elle ne trouve aucun écho narratif.

* Jess, la jolie fille en apparence superficielle mais dotée d’ambition, rêve de devenir avocate. Elle voudrait aider sa mère, qui s’est sacrifiée pour elle, mais cet objectif reste en arrière-plan. Sa storyline se concentre surtout sur la mode et des choix discutables, comme envisager de voler des copies du bac, en contradiction avec sa future vocation juridique. Introduit très tôt, son vœu de chasteté s’effondre soudainement lorsqu’elle décide d’avoir une relation sexuelle avec un garçon rencontré quelques jours plus tôt avec qui elle a échangé 3 textos. Elle explique vouloir « baiser » en urgence, mais avec préservatif, car elle a toujours eu peur de tomber enceinte. Ce revirement paraît surprenant, voire incohérent. / Aparté : dans une série young adult, c’est très positif de rappeler l’importance du préservatif, mais pourquoi limiter la justification à la seule peur de la grossesse, sans évoquer la prévention des IST ? D’autant plus que, finalement, les personnages annoncent n’avoir fait que des préliminaires « parce qu’il faut prendre son temps », message louable, mais qui semble, au passage, faire disparaître toute référence au préservatif et aux IST. Étonnant en 2025. Fin de l’aparté. / Sa rencontre avec son père biologique se conclut, elle aussi, sans véritable suite dramatique.

* Samia, la sportive, voit son rêve de carrière brisé par un problème cardiaque. Pourtant, ce handicap ne devient jamais un moteur narratif lié au loto : Elle aurait pu être pressée de recevoir les gains dans le but de changer son destin, de voir des médecins afin de pouvoir quand même devenir footballeuse. Mais non, elle se retrouve cantonnée à des déceptions et intrigues amoureuses.

* Léo, métisse anxieux et écolo, aurait pu vouloir utiliser l’argent pour agir sur ses convictions. Au lieu de cela, il sert principalement d’axe à une romance avec une « michto » du lycée. Sa famille recomposée, avec son demi-frère Tom, reste floue : leurs liens, leurs tensions potentielles, leurs origines communes ne sont jamais explorés.

* Tom, d’abord lourd et agaçant, devient plus attachant dans les derniers épisodes. Sa relation avec Léo aurait pu nourrir un conflit fraternel autour de la jalousie ou de l’argent.

* Paul, petit ami de Samia, n’apparaît vraiment que sur la fin. Ses talents de hacker arrivent tardivement, et sa motivation, purement amoureuse, semble fragile pour justifier ses agissements (comme s’il n’était pas du tout intéressé par l’argent… c’est peu crédible).

* Samir et Carla, figures du quartier, ne dépassent pas le rôle d’éléments perturbateurs extérieurs. Leur relation avec David est précisée bien trop tard : on apprend seulement à la fin qu’il vivait presque chez Samir.

* Victoire, étrange et intrusive au début, gagne en complexité au fil des épisodes, mais ses mensonges sur ses parents paraissent artificiels et leur explication peu crédible.

* Les figures secondaires comme Jordan, ex de Jess, ou la fille de Pivot, marquante mais cantonnée à un seul épisode, renforcent l’impression d’un vivier de personnages sous-utilisés.

Dans l’ensemble, les conflits sont essentiellement externes : les protagonistes réagissent plus qu’ils n’agissent. Le fil rouge du loto semble surtout un prétexte pour raconter des histoires adolescentes à Marseille, avec pour toile de fond musique urbaine et gags récurrents. L’humour, parfois amusant, parfois lourd, alterne avec des séquences de tension, mais sans atteindre une véritable émotion. Les péripéties se succèdent selon un schéma répétitif qui finit par affaiblir l’attachement émotionnel et noyer les enjeux principaux.

Un thème diffus

La série flirte avec plusieurs pistes : l’argent change-t-il vraiment les gens ? D’où vient-on et qu’est-ce qui nous définit ? La famille qu’on choisit vaut-elle plus que celle qu’on a ?Mais rien n’est poussé jusqu’au bout. Le final semble vouloir affirmer que “les amis sont plus importants que l’argent”… sans avoir construit ce choix de façon organique.

Humour et tension : un dosage inégal

Le mélange comédie / suspense est assumé, mais pas toujours maîtrisé. On passe de menaces sérieuses (armes, chantage) à de l’humour parfois amusant, parfois lourd, sans transition fluide, un peu à l’image de la série Family Business.Certains gags fonctionnent, d’autres cassent la tension ou parasitent les enjeux.

Un format qui s’essouffle

8 épisodes de 30 minutes peuvent sembler courts, mais la densité de péripéties, combinée au manque de progression émotionnelle, finit par fatiguer. Plusieurs arcs secondaires auraient gagné à être resserrés ou mieux connectés au fil rouge.

Conclusion

Young Millionaires est un divertissement efficace pour un public ado/jeune adulte : rythme, dialogues actuels, ambiance marseillaise et cliffhangers sont au rendez-vous.Mais la série risque de frustrer ceux qui espèrent une intrigue solide et un propos clair : le loto, censé être le moteur émotionnel, devient souvent un simple prétexte à enchaîner les péripéties.

Regardez Young Millionaires si:

* Vous aimez les séries adolescentes dynamiques, avec des rebondissements à chaque épisode.

* Vous êtes curieux de voir une production Netflix française ancrée à Marseille.

Si vous cherchez un récit resserré avec un dilemme thématique, des personnages dont l’évolution est construite et trouve sa juste résolution, vous risquez d’être déçus.

Avec ses qualités et ses défauts, Young Millionnaires confirme qu’il est agréable de voir Netflix miser de plus en plus sur des séries françaises, offrant ainsi une vitrine internationale à nos fictions locales.



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