Au moment où j’enregistre cette chronique, je rentre tout juste d’un voyage en Angleterre. Il y a plus exotique, me direz-vous, mais, tout de même, comme je n’y étais pas allé depuis des décennies, je n’ai pu qu’être frappé par de saisissants contrastes avec la France, en premier lieu sur le plan visuel.
Le bocage y est ainsi bien mieux préservé que chez nous, même en Normandie où l’arrachage des haies se poursuit malgré les politiques publiques visant à y mettre fin. J’ai roulé pendant des centaines de kilomètres (ou de miles) sur des routes de campagne qui serpentent au sein d’une végétation luxuriante, souvent bordées de grands arbres, y compris quand il s’agit de relier des villes de plusieurs dizaines de milliers d’habitants. Alors que l’on a créé chez nous des infrastructures routières disproportionnées et coûteuses, chamboulant les paysages, pour une circulation moins intense. Ainsi, dans l’Orne, on se fait une fierté des contournements de Bellême ou de Bazoches-sur-Hoëne, 800 habitants, et on dépense des dizaines de millions d’euros pour relier par une 4-voies deux villes de moins de 20 000 habitants, en l’occurrence Flers et Argentan, créant une véritable saignée dans le bocage. Notez bien qu’à population équivalente, la mortalité routière en Angleterre reste bien inférieure à celle de la France, ce qui montre bien l’inanité de notre politique, y compris sur ce plan.
En Angleterre, je n’ai pas vu non plus, même encore une fois autour de cités déjà importantes, de ces zones commerciales sans fin qui ont défiguré les abords de la moindre de nos villes et dont le développement a provoqué la perte de substance des centres historiques, dont bien des rues ne présentent plus qu’une suite de vitrines vides. Les centres-villes anglais me paraissent encore bien vivants et dynamiques.
Au-delà de l’impression visuelle, tout cela se traduit en chiffres. La surface artificialisée par habitant est plus faible au Royaume-Uni que dans n’importe quel pays de l’Union Européenne, et donc largement inférieure à la France qui, elle, est bien au-dessus de la moyenne européenne .
Chez nous, certains remettent en cause la loi « Climat et Résilience » de 2021 qui a défini un objectif de zéro artificialisation nette. Ce qui fait la richesse d’une nation, ce n’est pourtant pas les ronds-points et les voies express, mais la puissance de notre industrie et de notre agriculture, la qualité des services publics, la valeur de notre patrimoine et la préservation de notre environnement que nous avons beaucoup trop dégradé en France depuis une cinquantaine d’années. Il ne faudrait pas viser le zéro artificialisation nette, mais le zéro artificialisation brute, c’est-à-dire améliorer ce qui existe déjà et renoncer définitivement à bitumer et bétonner davantage.
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