Ludovic Manchon depuis Cherbourg revient sur la notion de dissuasion nucléaire dans son édito A vrai dire...
"Chers amis, les temps que nous traversons me portent à réclamer votre proximité, votre complicité, comme s’il fallait se serrer les coudes et nous réchauffer ensemble le corps et l’âme. Car quelle époque nous traversons ! Cette année, pour la première fois depuis 77 ans, une grande puissance a pris l’initiative de porter sur notre continent une guerre de grande ampleur. Mais cette puissance s’illustre ténébreusement par le fait qu’elle détient l’arme nucléaire. Le nucléaire ! Il me semble qu’on ne parle plus que de cela.
Né en 67, je peux vous témoigner qu’à ma façon, j’ai grandi dans la peur du nucléaire. Je me souviens de la double-page d’un magazine au début des années 80 reproduisant la carte politique de l’Europe d’alors, où l’empire soviétique se taillait la part du lion et sur le territoire duquel étaient représentés des missiles, les terrifiants « SS-20 », que l’URSS pouvait envoyer à tout moment sur toutes les capitales d’Europe. Des cercles concentriques indiquaient à partir de ces missiles quelles capitales pouvaient être atteintes en 3, 6, 9 minutes. En 10 minutes seulement, l’Europe pouvait être mise à feu nucléaire et à sang.
En 1983 sortait un film, Le Jour d’après, dans lequel les deux superpuissances se bombardaient mutuellement. Pourtant, un sentiment était ancré en moi que de tels scénarios ne pourraient jamais se produire dans la réalité. Et qu’on ne dise pas que c’était pure naïveté de ma part ou de la génération d’alors. Car c’est bien la peur du nucléaire qui, pendant des décennies, a dissuadé les grandes puissances de s’entre-tuer. Eh bien cette époque, pourtant terrible, paraîtrait presque un « âge d’or » comparé à la situation actuelle où il semble que l’évocation, pourtant désormais quotidienne, du nucléaire ne fasse même plus frémir. Tel dirigeant insiste pour héberger des missiles nucléaires sur son sol. Telle autre, dit- elle, fera la guerre « aussi longtemps qu’il le faudra ». Et ce qui me frappe tout autant, c’est l’absence d’indignation généralisée. Quel Jaurès lève aujourd’hui le poing devant les caméras pour dénoncer cette folie ? Serions-nous donc en proie à une sorte de terreur soumise ? Sommes-nous fatigués des affres de notre époque au point de vouloir en finir ? Ou bien nous sentons-nous mûrs pour assister de nos yeux à la fureur apocalyptique ? Amis auditeurs, je ne peux que souhaiter pour nous-mêmes de prier Dieu pour que brille toujours plus en nous la vertu d’Espérance, seule antidote à la drôle d’époque que nous traversons."
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