Il était une fois un homme qui avec son père cultivait un petit lopin de terre. Le vieil homme aimait prendre son temps. Le garçon était habituellement pressé, le genre fonceur. Un matin très tôt, ils attelèrent le bœuf à la charrette chargée et commercèrent leur grand voyage. Le fils se disait que s’ils marchaient plus vite et pendant toute la journée et toute la nuit, ils seraient au marché tôt le lendemain matin. Alors il aiguillonnait le bœuf avec la pointe d’un bâton pressant l’animal d’avancer.
« Ne te presse pas mon fils », dit le vieil homme. « Tu vivras plus longtemps ! »
« Mais si nous arrivons au marché avant les autres nous aurons plus de chance d’obtenir de bons prix ! » répondit le fils.
Pas de réaction, le père se contenta de se couvrir les yeux avec son chapeau et s’endormit sur le siège. Énervé et irrité, le jeune homme continua d'éperonner le bœuf d’avancer plus vite, mais en entêté, l’animal refusa de changer son pas. Quelques heures plus tard, ils arrivèrent à une petite maison.
« Voici la maison de ton oncle ! » arrêtons-nous pour le saluer
« Mais nous avons déjà perdu une heure ! » se plaignit le fils
« Dans ce cas, quelques minutes de plus n’y changeront rien. Mais nous nous voyons maintenant que très rarement » répondit doucement le père.
Le fils s’impatienta et ragea. Tandis que les deux vieux rirent et parlèrent pendant près d’une heure.
De nouveau sur la route, le père dirigea le bœuf à son tour. Le père fit tourner le bœuf à droite.
« La gauche est plus rapide » dit le fils
« Je le sais » répliqua le vieil homme. « Mais cette route est tellement plus jolie. »
« N’as-tu aucun respect pour le temps ? » demanda le jeune homme impatiemment
« Oh je le respecte beaucoup, c’est pour cela que j’aime contempler la beauté et profiter de chaque instant à son maximum. »
« Dormons ici » dit-il en soupirant
« C’est la dernière fois que je voyage avec toi ! » lança son fils. « Tu préfères regarder les couchers de soleil et sentir les fleurs que de faire de l’argent. »
« Et bien c’est la chose la plus aimable que tu m’aies dite depuis longtemps ! » dit le père en souriant
Quelques minutes plus tard, il ronflait. Tandis que son fils lançait un regard furieux vers les étoiles. La nuit s’écoulait lentement et le fils était agité. Avant le lever du soleil, le jeune homme s’empressa de réveiller son père, ils montèrent dans la charrette et partirent. À un demi-kilomètre de là, ils rencontrèrent un autre fermier, un parfait inconnu qui essayait de sortir sa charrette du faussé.
« Aidons-le » chuchota le vieil homme
« Pour perdre plus de temps ! » explosa le fils
« Détends-toi mon fils, tu pourrais toi aussi être dans un faussé un jour. Nous devons aider les autres qui sont dans le besoin, n’oublie pas cela. »
Le garçon détourna le regard en colère, il était presque huit heures ce matin lorsque l’autre charrette fût de nouveau sur la route. Soudain un gros éclair fendit le ciel, un coup de tonnerre suivit. Au-delà des collines le ciel s’assombrissait.
« On dirait qu’il pleut très fort dans la ville » dit le vieil homme
« Et si nous nous étions pressés nous aurions presque tout vendu déjà » grogna son fils
« Ne te presse pas tu vivras plus longtemps et tu apprécieras la vie tellement plus » lui conseilla l’aimable vieillard
Ce n’est que tard dans l’après-midi qu’ils atteignirent la colline dominant la ville. Ils s’arrêtèrent pour la regarder très longuement. Ni l’un ni l’autre ne disait mot. Finalement, le jeune homme mit la main sur l’épaule de son père en disant :
« Je vois ce que tu veux dire papa » Ils tournèrent leur charrette et commencèrent à s’éloigner de ce qui avait été la ville de Nagasaki !