En 1675, Jésus apparaissait à Sainte Marguerite Marie et lui révélait son Sacré Cœur. Aidée par le Père Claude La Colombière, elle transmettrait au monde la demande du Christ lui-même d’instaurer une fête du Sacré Cœur le vendredi suivant l’octave de la fête de son Corps et de son Sang.
Ces révélations, survenues en pleine efflorescence du jansénisme, étaient un véritable coup d’État spirituel : un de ces coups de force qu’accomplit Dieu lorsque des vérités qui fondent la foi chrétienne sont menacées de tomber dans l’oubli. La vérité menacée par le jansénisme à l’époque de Sainte Marguerite Marie était celle de la miséricorde, qui dépasse sans la supprimer la justice de Dieu.
Dans la vie spirituelle, il est important de bien distinguer ce qui relève de la dévotion et ce qui relève du culte. Les dévotions sont légitimes mais non nécessaires, parce qu’elles ne touchent pas aux éléments centraux, fondateurs de la foi. Le culte, au contraire, en fait intrinsèquement partie : la vénération du Cœur de Jésus n’est pas une dévotion, mais un culte.
Essayons de préciser en quoi consiste ce culte. Il est bien sûr lié à l’amour de Dieu, car « Dieu est amour ». Mais il ne s’agit pas de l’amour de Dieu en général, ce qui serait une banalité. Il s’agit de l’affirmation inouïe que cet amour a pris chair dans une vie humaine, avec l’incroyable richesse de ses sentiments et de ses volontés. Le Sacré Cœur, c’est le culte de l’amour incarné.
Un culte qui s’enracine avant tout dans le mystère de la Croix. Le Sacré Cœur est le Cœur du Crucifié, d’où ont jailli l’eau du baptême et le sang de l’eucharistie. C’est aussi le Cœur du Ressuscité, dans lequel saint Thomas a été invité à entrer (« entre dans mon côté » dit Jésus) pour s’abîmer dans l’océan de la miséricorde. C’était déjà le Cœur de cet homme qui pleurait son ami Lazare, qui exultait devant la grâce de la connaissance de Dieu accordée aux tout-petits plutôt qu’aux savants et aux sages, qui était saisi de pitié devant la détresse des foules sans berger, ou encore d’admiration devant la foi du centurion. C’était déjà le Cœur du nouveau-né de la crèche qui palpitait contre le sein de sa Mère, ou de l’enfant de Nazareth qui observait avec application et tendresse le savoir-faire de Joseph, qui priait avec ferveur le Dieu Père d’Israël avec les mots de son peuple, ou qui s’attardait dans le Temple pour écouter les paroles des scribes sans à peine se rendre compte que ses propres questions les réduisaient au silence par la profondeur de leur sagesse.
Désormais, depuis l’Ascension à la droite du Père, le Cœur du Christ ressuscité ne cesse plus de battre dans la vie trinitaire. Et chacun des battements de ce Cœur nous rapproche de la fin de toutes choses, quand l’œuvre immense de la création sera enfin récapitulée dans le brasier de l’amour de Dieu.
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